Page:Bakounine - Œuvres t4.djvu/346

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dit-on, s’efforçaient d’éterniser leur vie propre en s’infusant le sang des jeunes gens qu’ils |45 tuaient. Rome n’est pas seulement le dupeur de tout le monde, elle est la dupe d’elle-même. Elle ne trompe pas seulement, elle se trompe. Voilà son incurable sottise. Elle consiste dans cette prétention d’éterniser son existence, et cela à une époque où tout le monde prévoit déjà sa fin prochaine, ses Syllabus et sa proclamation du dogme de l’infaillibilité papale étant une preuve évidente de démence et d’incompatibilité absolue avec les conditions les plus fondamentales de la société moderne ; c’est la démence du désespoir, ce sont les dernières convulsions du mourant qui se raidit contre la mort.

En 1848, Rome n’était pas encore arrivée à ce point. Les événements qui avaient précédé cette époque : la révolution bourgeoise de 1830 et la chute de l’ultramontanisme qui en avait été la conséquence naturelle, la défaite éclatante des Jésuites en Suisse, le dévergondage libéral de Pie IX et la haine manifestée par ce pape contre ces champions de l’Église durant toute la première année de son règne, enfin la révolution républicaine de Février elle-même, n’étaient point de nature à inspirer au gouvernement suprême de l’Église, dirigé exclusivement, comme on sait, depuis la fin du dix-huitième siècle, par la Société de Jésus, une confiance insensée en lui-même. Tous ces événements lui commandaient au contraire beaucoup de modération et beaucoup de prudence. Ce n’est qu’après les