Page:Bakounine - Œuvres t4.djvu/508

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latins et en prose, et en même temps arrogants, jaloux, tracassiers, s’injuriant, se calomniant, se dénonçant mutuellement, et poussant cette guerre incivile de pédants, comme dans la comédie de Molière, jusqu’à se prendre aux cheveux quelquefois, — tels furent les nobles instructeurs et éducateurs de la jeunesse allemande pendant ces deux siècles.

À côté des deux sciences principales, la théologie et le droit, il y en avait une troisième, qui enseignait en quelque sorte la théorie de leur application à la vie pratique : c’était la science politique, la science de l’État, ou proprement la science du service de l’État. Elle embrassait l’administration, les finances et la diplomatie, et devait, aussi bien que les deux autres, mais d’une manière encore plus spéciale, former les bureaucrates, les fidèles serviteurs de l’État. Car il faut observer qu’à cette époque, en Allemagne, les mots « patrie », « nation », étaient complètement ignorés. Il n’y avait que l’État, ou plutôt une infinité d’États, grands, moyens, petits et très petits. Il n’y en avait proprement qu’un seul véritablement grand, c’était l’Autriche, qui se trouvait à la tête de toute l’Allemagne comme |64 chef de l’Empire, mais qui n’avait ni la puissance, ni même la volonté de mettre un frein à l’arbitraire despotique des souverains moyens et petits dans leurs États respectifs. Pour le sujet, et à plus forte raison pour le fonctionnaire, l’Allemagne n’existait pas : il ne connaissait que l’État grand, moyen ou petit qu’il servait et qui