Page:Bakounine - Œuvres t5.djvu/45

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question. Or, cet affranchissement général n’est possible qu’avec des moyens radicaux qui excluent toute possibilité de compromis ou de concession ; le Congrès de Bruxelles l’a compris, et c’est pour cela qu’il a invité la Ligue de la paix et de la liberté à se dissoudre, manifestant ainsi la volonté des travailleurs de rompre avec la démocratie bourgeoise, et déclarant en quelque sorte que l’Association internationale des travailleurs ne veut plus reconnaître d’autre politique que celle qui aurait pour but immédiat et direct l’affranchissement radical du dernier des misérables[1].

  1. Au troisième Congrès général de l’Internationale à Bruxelles (septembre 1868), Perron avait été un des trois délégués qui avaient voté contre l’invitation adressée à la Ligue de la paix d’avoir à se dissoudre (les deux autres étaient De Paepe et Catalan). Bakounine avait écrit à Gustave Vogt, président de la Ligue (dont à ce moment il était encore membre), à propos de cette décision du Congrès de l’Internationale : « La décision prise ou plutôt qu’on a fait prendre au Congrès de Bruxelles par rapport à nous est une impertinence… [Mais] quelque désagréable et mesquine que se soit montrée la Ligue des ouvriers par rapport à nous, nous ne pouvons ni ne devons tout de même méconnaître l’immense et utile portée du Congrès de Bruxelles. C’est un grand, le plus grand événement de nos jours ; et, si nous sommes nous-mêmes de sincères démocrates, nous devons non seulement désirer que la Ligue internationale des ouvriers finisse par embrasser toutes les associations ouvrières de l’Europe et de l’Amérique, mais nous devons y coopérer de tous nos efforts, parce qu’elle seule constitue aujourd’hui la vraie puissance révolutionnaire qui doit changer la face du monde. » — Maintenant, comme on le voit, Perron et Bakounine donnaient pleinement raison à la décision du Congrès de Bruxelles : l’attitude de la majorité, au Congrès de la Ligue à Berne, avait clairement démontré que la démocratie bourgeoise ne voulait pas sincèrement l’émancipation des travailleurs.