de chaque individu est la résultante, toujours de nouveau reproduite, de cette quantité d’influences matérielles, intellectuelles et morales que tous les individus qui l’entourent, que la société au milieu de laquelle il naît, se développe, et meurt, exercent sur lui. Vouloir échapper à cette influence, |132 au nom d’une liberté transcendante, divine, absolument égoïste et se suffisant à elle-même, c’est se condamner au non-être ; vouloir renoncer à l’exercer sur autrui, c’est renoncer à toute action sociale, à l’expression même de sa pensée et de ses sentiments, c’est encore aboutir au non-être ; cette indépendance tant prônée par les idéalistes et les métaphysiciens, et la liberté individuelle conçue dans ce sens, c’est donc le néant.
Dans la nature comme dans la société humaine, qui n’est encore autre chose que cette même nature, tout ce qui vit ne vit qu’à cette condition suprême d’intervenir de la manière la plus positive, et aussi puissamment que le comporte sa nature, dans la vie d’autrui. L’abolition de cette influence mutuelle serait donc la mort. Et quand nous revendiquons la liberté des masses, nous ne prétendons nullement abolir aucune des influences naturelles d’aucun individu ni d’aucun groupe d’individus qui exercent leur action sur elles. Ce que nous voulons, c’est l’abolition des influences artificielles, privilégiées, légales, officielles. Si l’Église et l’État pouvaient être des institutions privées, nous en serions les adversaires sans doute, mais nous ne proteste-