Page:Bakounine - Œuvres t6.djvu/286

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patriote et ami » ; après quoi il accourut vers moi et me dit : « Vous ne m’en voulez pas, n’est-ce pas, de ce que je vous ai nommé mon ami ? » — « Pas le moins du monde », lui répondis-je. Après quoi nous nous séparâmes, et nous ne nous vîmes plus qu’à Genève, deux ou trois fois. À la veille de mon départ, étant venu prendre congé de l’Internationale, j’eus l’occasion de relever seulement quelques sottises qu’il avait dites du haut de la tribune[1]. Nous ne nous sommes plus jamais rencontrés depuis.

|107 Outine était arrivé à Genève avec deux pensées fixes, l’une inspirée par la haine féroce qu’il m’avait vouée, l’autre par son ambition vaniteuse : c’était de me détruire, et de devenir le grand homme de l’Internationale de Genève. Grâce à l’habileté, à la tactique savante et à l’activité énergique de nos amis, il a pu réaliser l’une et l’autre.

Tandis que nos deux amis Perron et Robin, infatués de l’efficacité infaillible de leurs plans stratégiques, spirituellement certains de leur triomphe qui leur paraissait inévitable, suivaient, en vrais théoriciens abstraits qu’ils étaient tous les deux, la

  1. Dans l’assemblée générale du 27 octobre 1869, dont le compte-rendu se trouve dans l’Égalité du 30 octobre, Outine avait fait un long éloge des Trade Unions, qu’il avait proposées comme « des modèles de solidarité et de bonne organisation de la résistance ». Bakounine fît observer que « les Trade Unions avaient un but beaucoup moins radical que l’Internationale, les premières ne cherchant qu’à améliorer la situation de l’ouvrier dans le milieu existant, la seconde poursuivant la transformation sociale complète, la suppression du patronat et du salariat ».