Page:Bakounine - Dieu et l’État, 1892.djvu/51

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

même un véritable homme de génie, le démoraliser, l’abêtir ; et enfin, parce qu’elle se donnerait un maître.

Je me résume. Nous reconnaissons donc l’autorité absolue de la science, parce que la science n’a d’autre objet que la reproduction mentale, réfléchie et aussi systématique que possible, des lois naturelles qui sont inhérentes à la vie matérielle, intellectuelle et morale, tant du monde physique que du monde social, ces deux mondes ne constituant, dans le fait, qu’un seul et même monde naturel. En dehors de cette autorité uniquement légitime, parce qu’elle est rationnelle et conforme à Îa liberté humaine, nous déclarons toutes les autres autorités mensongères, arbitraires et funestes.

Nous reconnaissons l’autorité absolue de la science, mais nous en repoussons l’infaillibilité et l’universalité du savant. Dans notre église à nous, — qu’il me soit permis de me servir un moment de cette expression que d’ailleurs je déteste : l’Église et l’État sont mes deux bêtes noires, dans noire Église, comme dans l’Église protestante, nous avons un chef, un Christ invisible, la science ; et comme les protestants, plus conséquents même que les protestants, nous ne voulons y souffrir ni pape, ni concile, ni conclaves de cardinaux infaillibles, ni évêques, ni même de prêtres. Notre Christ se distingue du Christ protestant en ceci, que ce dernier est un être personnel, le nôtre impersonnel ; le Christ chrétien, déjà accompli dans un passé éternel, se présente comme un être parfait, tandis que l’accomplissement et la perfection de notre Christ à nous, la science, sont toujours dans l’avenir : ce qui équivaut à dire qu’ils ne se réaliseront jamais. En ne reconnaissant l’autorité absolue que de la science absolue, nous n’engageons donc