Page:Bakounine - Dieu et l’État, 1892.djvu/57

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t on au peuple dans ces écoles ? « Les devoirs de l’homme, le sacrifice et le dévouement. » — Mais où prendrez-vous un nombre suffisant de professeurs pour enseigner ces choses, qu’aucun n’a le droit ni le pouvoir d’enseigner, s’il ne prèche d’exemple ? Le nombre des hommes qui trouvent une jouissance suprême dans le sacrifice et dans le dévouement n’est-il pas excessivement restreint ? Ceux qui se sacrifient au service d’une grande idée obéissent à une haute passion, et, satisfaisant cette passion personnelle, en dehors de laquelle la vie elle-même perd toute valeur à leurs yeux, ils pensent ordinairement à tout autre chose qu’à ériger leur action en doctrine, tandis que ceux qui en font une doctrine oublient le plus souvent de la traduire en action, par cette simple raison, que la doctrine tue la vie, tue la spontanéité vivante de l’action. Les hommes comme Mazzini, dans lesquels la doctrine et l’action forment une admirable unité, ne sont que de très rares exceptions. Dans le Christianisme aussi, il y a eu de grands hommes, de saints hommes, qui ont fait réellement, ou qui, au moins, se sont passionnément efforcés de faire tout ce qu’ils disaient, et dont les cœurs, débordant d’amour, étaient pleins de mépris pour les jouissances et pour les biens de ce monde. Mais l’immense majorité des prêtres catholiques et protestants qui, par métier, ont prêché et qui prêchent la doctrine de la chasteté, de l’abstinence et de la renonciation, démentent leur doctrine par leur exemple. Ce n’est pas en vain, c’est à la suite d’une expérience de plusieurs siècles que chez les peuples de tous les pays se sont formés ces dictons : « Libertin comme un prêtre ; gourmand comme un prêtre ; ambitieux comme un prêtre ; avide, intéressé et