Page:Bakounine - Dieu et l’État, 1892.djvu/73

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de ces questions que la foi seule, cette affirmation passionnée et stupide de l’absurde, peut résoudre. C’est le plus grand des miracles. Ici, nous n’avons pas à faire autre chose qu’à constater les effets, les conséquences pratiques de ce miracle.

Après des milliers de siècles de vains efforts pour revenir à elle-même, la Divinité, perdue et répandue dans la matière qu’elle anime et qu’elle met en mouvement, trouve un point d’appui, une sorte de foyer pour son propre recueillement. C’est l’homme, c’est son âme immortelle emprisonnée singulièrement dans un corps mortel. Mais chaque homme considéré individuellement est infiniment trop restreint, trop petit, pour enfermer l’immensité divine ; il ne peut en contenir qu’une très petite parcelle, immortelle comme le Tout, mais infiniment plus petite que le Tout. Il en résulte que l’Être divin, l’Être absolument immatériel, l’Esprit, est divisible comme la matière. Voilà encore un mystère dont il faut laisser la solution à la foi.

Si Dieu tout entier pouvait se loger dans chaque homme, alors chaque homme serait Dieu. Nous aurions une immense quantité de Dieux, chacun se trouvant limité par tous les autres et n’en étant pas mois infini, contradiction qui impliquerait nécessairement la destruction mutuelle des hommes, l’impossibilité qu’il y en eût plus qu’un. Quant aux parcelles c’est autre chose ; rien de plus rationnel, en effet, qu’une parcelle soit limitée par une autre, et qu’elle soit plus petite que le tout. Seulement, ici se présente une autre contradiction Être plus grand et plus petit sont des attributs de la matière, non de l’esprit tel que l’entendent les idéalistes, Selon les matérialistes, il est vrai, l’esprit n’est que le