Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1855, tome 19.djvu/335

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FERDINAND.

Allons donc ! tout au plus des délits que les juges voudraient avoir commis.

RAMEL.

C’est que je ne t’écouterais pas ; ou, si je t’écoutais…

FERDINAND.

Eh bien ?

RAMEL.

Je demanderais mon changement.

FERDINAND.

Allons, tu es toujours mon bon, mon meilleur ami… Eh bien ! depuis trois ans j’aime tellement mademoiselle Pauline de Grandchamp, et elle…

RAMEL.

N’achève pas, je comprends. Vous recommencez Roméo et Juliette… en pleine Normandie.

FERDINAND.

Avec cette différence que la haine héréditaire qui séparait ces deux amants n’est qu’une bagatelle en comparaison de l’horreur de M. de Grandchamp pour le fils du traître Marcandal !

RAMEL.

Mais voyons ! mademoiselle Pauline de Grandchamp sera libre dans trois ans ; elle est riche de son chef (je sais cela par les Boudeville) ; vous vous en irez en Suisse pendant le temps nécessaire à calmer la colère du général ; et vous lui ferez, s’il le faut, les sommations respectueuses.

FERDINAND.

Te consulterais-je, s’il ne s’agissait que de ce vulgaire et facile dénoûment ?

RAMEL.

Ah ! j’y suis ! mon ami. Tu as épousé ta Gertrude… ton ange. qui s’est comme tous les anges métamorphosée en… femme légitime.

FERDINAND.

Cent fois pis ! Gertrude, mon cher, c’est… madame de Grandchamp.

RAMEL.

Ah çà ! comment t’es-tu fourré dans un pareil guêpier ?

FERDINAND.

Comme on se fourre dans tous les guêpiers, en croyant y trouver du miel.