Page:Balzac - La Famille Beauvisage.djvu/82

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cer se prouvent ; vous avez la preuve, n’est-ce pas, que je suis le fils de Jacques Collin, le forçat, et le neveu de madame Saint-Estève ? Ces preuves, ajouta-t-il d’un geste menaçant, vous allez me les montrer !

L’accent, le geste, en un mot, toute l’habitude extérieure de Sallenauve avait quelque chose de si effrayant ; ils annonçaient si bien un homme hors de lui et capable de se porter aux dernières extrémités, qu’au lieu de lui répondre, Rastignac tira l’une des sonnettes qui pendaient du plafond au-dessus de son bureau. Cette sonnette répondait à une pièce voisine où se tenait le jeune de Restaud, le chef du cabinet, qui entra presqu’aussitôt :

— Tenez, lui dit Rastignac en lui donnant des papiers, voilà plusieurs lettres auxquelles il faut répondre sans retard.

En jetant les yeux sur la première de ces prétendues lettres pressées, le jeune chef de cabinet reconnut aussitôt qu’elle n’avait pas le moindre caractère d’urgence ; mais il avait remarqué l’agitation de Sallenauve ; il était près de minuit, et, à cette heure, le député de l’opposition était en conférence animée avec le ministre. Il devait donc y avoir quelque chose d’extraordinaire. M. de Restaud ne fit aucune observation et sortit.


VIII

SUITE ET FIN


— Monsieur, dit Rastignac à Sallenauve, qui avait repris un peu de sang-froid, vous voyez qu’il serait parfaitement inutile de me demander avec violence des preuves que je n’ai jamais eu l’intention de vous refuser. Vous plaît-il maintenant que nous menions à fin cette triste affaire, ou voulez-vous remettre la conférence à un autre jour !

— Je vous demande pardon, répondit Sallenauve, de l’emportement où je me suis laissé entraîner. Je suis