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Page:Banville - Œuvres, Les Exilés, 1890.djvu/218

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LES EXILÉS

Chantaient. Elles disaient les généalogies
Des Dieux, les saintes Lois domptant les Énergies
Premières, et comment Typhôeus tout en feu
Fut vaincu par le Roi rayonnant du ciel bleu
Qui le précipita dans le large Tartare.
Elles disaient comment du noir Chaos barbare
Put naître l’Harmonie éternelle, et comment
Au firmament les clairs astres de diamant,
Entraînés par la joie amoureuse et physique
Du nombre, sont la Lyre immense et la Musique
Sans fin ! Les Immortels les écoutaient, ravis,
En savourant le vin vermeil, et je les vis !
Je vis Zeus que le Mal en sa haine déteste,
Zeus ayant sur le front la lumière céleste !
Je vis les Rois-Soleils, les gloires de l’azur :
Héraklès radieux, vainqueur du monstre impur,
Le beau Dionysos, dont le regard essuie
Les cieux et fait tomber la bienfaisante pluie
Qui s’élance, flot d’or, dans les pores ouverts
De notre terre, et fait gonfler les bourgeons verts ;
Hypérion, qui fait planer sur nos désastres
Le mouvement toujours mélodieux des astres,
Et celui que Dèlos révère, Apollon-Roi,
Le clair témoin, l’archer qui lance au loin l’effroi,
Et qui donne à la terre, où son regard flamboie,
Les chansons et l’orgueil des blés d’or et la joie.
Puis je vis Hermès, qui, sur le mont déjà noir,
Vole avec art les gais troupeaux roses du soir ;