Page:Barbey d'Aurevilly - Une vieille maitresse, tome 1.djvu/112

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gue qui lui manquait encore et dont il ne devait prononcer les mots trop brûlants que dans quelques jours. Aussi, à tout moment, Ryno de Marigny entourait-il Hermangarde de ces mille délicates attentions qui traduisent l’idée fixe autour d’une femme en ravissantes et légères arabesques, qui la chiffrent sous chaque regard et sous chaque pas, et il mêlait tellement son âme à ces soins officiels et obligés pour tout homme du monde, et qui sont si souvent les truchements d’un cœur qu’on n’a pas, qu’on y sentait comme un avant-goût des caresses. Les petits soins sont les grands pour les femmes. Sachant mieux que les hommes jouer avec leurs sentiments les plus sérieux sans les diminuer, elles sont en général très sensibles à l’expression d’un sentiment plein de vigueur et de fougue qui ajoute à sa magie celle de la légèreté et de la grâce. Cela était vrai surtout pour la marquise de Flers. Née sous Louis XV, le Bien-Aimé, elle était plus femme qu’une autre femme, et elle admirait bien plus qu’Hermangarde, trop enivrée pour rien discerner, les ressources de cet amour toujours éloquent dans ses façons multiples de s’exprimer et qui, Protée changeant et présent, avait l’art des métamorphoses.

Et cependant, quoique sous le coup de ces impressions sans cesse renouvelées, madame