Page:Barbey d'Aurevilly - Une vieille maitresse, tome 2.djvu/224

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de haie ou de grève, abritées contre le vent de la mer par une butte revêtue d’herbe courte et semée de joncs. C’était dans ces chaumières et derrière cette butte, — au sommet de laquelle on avait planté un bâton d’où pendait un bouquet de houx, pour dire aux promeneurs du dimanche et aux matelots en relâche sous Carteret, qu’on vendait du cidre aussi bien au Bas-Hamet qu’à Barneville, — que vivaient pêle-mêle plusieurs familles de poissonniers. Et comme ces familles ne frayaient guères qu’entre elles, il y en avait deux du même nom, dont l’une, pour se distinguer de l’autre, avait pris le nom de ce hameau solitaire, et n’était plus connue à la ronde que sous la dénomination de Bas-Hamet. Ces Bas-Hamet étaient les hôtes de Vellini. Ils lui avaient cédé pour une faible somme sa part de cabane, séparée par un mur, sous le même toit qu’eux, et porte à porte avec la leur. C’était là qu’elle vivait, la Vellini. Singulière dérive de la destinée ! La fille des balcons voilés de Malaga n’avait plus, pour distraire la rêverie engourdie de ses longs yeux noirs, que la vue éternelle du varech accumulé devant les portes de ces chaumines, et qui, mêlé et trituré avec le sable, produit un engrais excellent, disent les laboureurs de ce pays. Quand le temps était beau, elle y voyait jouer de petits enfants aux jambes nues, pen-