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mangarde, soit madame d’Artelles, avait terminé sa toilette et pouvait vaquer, si besoin était, à tous ses devoirs de châtelaine. N’oublions pas, pour faire mieux comprendre cette douairière incomparable, comme le monde n’en reverra jamais plus, que sa toilette était d’autant plus longue qu’elle la mesurait sur son âge. Elle pensait, comme ce jeune et aimable sage dont elle aurait été digne d’être la mère et à qui de précoces infirmités avaient appris la vieillesse[1] : que plus on vieillit, plus on doit se parer. Aux différentes phases de sa vie, elle s’était mise avec le goût d’une femme qui a dans l’esprit toutes les nuances. Elle prouvait, à son déclin, qu’elle savait son métier de vieille, comme elle avait su tous les autres à chaque marche de cet escalier du temps, qu’elle avait descendu comme elle descendait dans sa jeunesse le grand escalier de Versailles. « Les femmes comme nous — disait-elle souvent — se doivent de mourir dans leurs dentelles. » C’était, à ses yeux, la pourpre qu’il ne fallait jamais dévêtir, quand on avait été une des reines de l’aristocratie française qui avaient porté le sceptre d’éventail à Trianon.

L’exactitude de grande dame que madame la marquise de Flers admettait dans toute son

  1. Vauvenargues.