Page:Barbey d'Aurevilly - Une vieille maitresse, tome 2.djvu/313

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Nulle mesquine jalousie, du reste, nul sentiment haineux ou bas, nul désir, nul projet de troubler une union qui eût irrité les féroces Vanités d’une autre femme qu’elle, ne la poussaient aux lieux où je menais une vie heureuse. Elle y venait sans plan arrêté, violentée par une attraction souveraine, ayant seulement la rage de voir Ryno, comme elle disait dans son langage familier et énergique… Mais qui l’aurait cru ? L’aurais-je cru moi-même ? En venant vers moi, l’attraction qui l’entraînait, elle me l’apportait ! Elle me la soufflait de loin. Elle me l’envoya par le regard, comme on envoie la mort, disent les pasteurs de la Calabre, en parlant de certains yeux qui ont, racontent-ils, ce funeste et terrible don. Rencontrée à peine, tant nous nous croisâmes vite sur cette route où vous veniez de disparaître ! j’emportai dans notre manoir de Carteret, dans ce nid d’Alcyon d’un amour sans orages, une impression du passé, vivant dans cette femme, et qui soudainement en éveilla une myriade d’autres au fond de mon cœur ! Je crus que toute cette poussière de nos débris, qui brille comme des étincelles d’or quand un rayon de souvenir les frappe de côté et les colore, tomberait et s’apaiserait sous toutes les limpides tendresses qu’y épanchait incessamment Hermangarde. Je me trompais. Aucun de ces atomes enflammés de