Page:Barbey d'Aurevilly - Une vieille maitresse, tome 2.djvu/364

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la bise soufflait dans la grève à vous couper la figure en trente-six morceaux.

— Vous aviez p’t’être trop bu d’un coup ?… — dit l’hôtesse du cabaret de la Butte, comme un cavalier allonge un coup d’éperon, en serrant la bride à son cheval.

— Non ! foi d’homme ! — reprit le narrateur. — Il était plus de minuit et je m’en r’venais de la pêche aux crabes. J’n’avais rien pris. Ma hotte était vide. La nuit avait été mauvaise comme quand la Caroline ou le Criard sont sous les dunes. Justement, je l’avais aperçue, la Caroline, qui rôdait aux environs du manoir. J’aurais même juré en justice qu’elle était entrée dans les cours ; et je m’dis, l’ayant vue de loin et ne la trouvant plus lorsque je passai devant les portes : « Est-ce qu’il y a queuque malheur qui menace les gens du manoir, que la Caroline hante chez eux, la nuit ? » Et je passai sans me détourner, car j’n’aime pas à la rencontrer, c’est la vérité ! quand, au bout du petit pont dont je t’nais la rampe, v’là que j’entends, patraflas ! et que j’avisai le cheval de M. de Marigny, qui entrait dans l’eau des quatre pieds. « Bon ! — me dis-je encore, en pensant à tous les propos de la fille de chambre, — bien sûr qu’il revient de voir la Mauricaude au Bas-Hamet. » I’me r’connut comme j’l’reconnaissais, et j’nous parlâmes. Mais p’t-être