Page:Barbey d’Aurevilly - Les Poètes, 1889.djvu/244

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des sont, je crois, de 1841, est un des premiers romantiques en date, mais aussi en intensité. C’est un romantique, et qui n’a jamais (sa seule manière d’être Vestale ! ) éteint en lui le feu sacré. C’est un romantique, lyrique comme pas un. Elégiaque aussi, mais moins élégiaque que lyrique, et quoique élégiaque, à ses heures, comme les romantiques, qui ont tous, plus ou moins, chanté la romance du Saule avant de mourir, ayant, lui, une qualité d’esprit rare chez les romantiques, et que les romantiques qui ne l’avaient pas se permettaient de mépriser… Bien entendu, puisqu’ils ne l’avaient pas.

M. Théodore de Banville a, de nature, l’imagination joyeuse. Il a un diamant de gaieté qui rit et lutine de ses feux, et cela le met à part dans l’Heptarchie romantique. Cela le met à part de Lamartine, ce-Virgile chrétien plus grand que Virgile, et que Racine, s’il revenait —au monde, adorerait à genoux ! Cela le met à part d’Alfred de Vigny, poète anglais en langue française, qui avait la beauté anglaise, l’originalité anglaise, la pureté et même la pruderie anglaises ; qui, comme les grands Anglais, ne relevait que de la Bible et de luimême, et qui avait le dédain anglais pour cette société démocratique qu’est devenue l’ancienne société française. Cela le met à part de Gautier, gai à peu près comme un émail ou comme un camée… Cela met enfin, son individualité dans sa race, et cela suffit pour le faire tout autre que Victor Hugo et Alfred de Musset