Page:Barbey d’Aurevilly - Les Romanciers, 1865.djvu/123

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dans ses goussets, il serait ici, nous en convenons, dans son vrai genre, il aurait découvert son filon. Maître Pierre, c’est la théorie du drainage mise en action, en scène et en récit, et le décousu que M. About a dans l’art lui sied assez bien dans ce micmac de l’industrialisme, auquel il a livré sa plume. Il n’est pas certainement un vulgarisateur bien sérieux et bien exact. Sa légèreté naturelle y répugne. Seulement ici, disons-le bien, une vocation réelle se dessine : rendre la réclame lisible aux bourgeois qui s’ennuient et forcer l’art à répondre docilement au coup de sonnette du comptoir et au judas du marchand !

Voilà incontestablement le mérite de l’auteur de Maître Pierre. Avec deux ou trois conseils, il tiendrait son genre, — l’annonce illustrée, — et la Critique, en les lui donnant, devrait surtout l’empocher de retourner à cette vieille littérature qui a la bonté de s’occuper, en retardataire, des développements et des problèmes du cœur humain. Quand on est taillé pour écrire des Maître Pierre, on laisse là les Germaine ! On y gagne plus d’honneur et de fortune, à coup sûr. Un jour, les fabricants de tuyaux pour le drainage dresseront des statues de carton-pierre à M. About chez tous les libraires des chemins de fer qui débitent ses livres. On y trouvera, dans la vaste et fructueuse spécialité d’art qu’il ouvre aujourd’hui, des compositions de l’ordre de Maître Pierre : des romans qu’il prépare, assure-t-on, sur l’air comprimé, sur les tunnels sous-mer et les aqueducs suspendus, l’aérostat et ses effets, la photographie de chez Giroux, les silos pour les conserves de céréales, les campagnes