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14 mai 1841.


Mon cher Trebutien,

Je vous remercie, ainsi que M. Alph. Le Flaguais, de la réclame insérée dans la Revue de Caen. À la noblesse et à l’amabilité du procédé je vous ai reconnu sans peine. — Depuis longtemps mon intention était de vous prévenir, de vous demander de renouer les relations que j’ai toujours regardées comme ce qu’il y eut de meilleur dans ma vie ; vous le saviez, je l’avais dit à M. Gaudin qui vous l’avait assuré. Vous avez été assez généreux pour ne pas m’attendre et pour me témoigner que l’ami n’était pas mort en vous. Vous avez sur moi l’avantage d’une initiative qui m’a profondément touché. — Que vous ne m’ayez pas oublié, que vous me reveniez par une attention pleine de délicatesse et d’obligeance, voilà ce que j’estime plus que l’éloge (beaucoup trop grand d’ailleurs) que vous avez inspiré à la Revue de Caen ; voilà ce que je mets bien au-dessus de tous les succès littéraires, même de ceux auxquels il ne m’est pas permis de penser.

Quand vous m’aurez dit par quelle voie il faut vous envoyer mon brimborion de livre[1], je vous l’enverrai immédiatement. C’est, comme vous l’avez vu, une espèce de mauvaise plaisanterie écrite pour les porteuses de manches plates et qui a assez pris dans le monde ici. L’important était que ce fût écrit avec une légèreté qui s’en va, chaque jour, des livres et du monde, au grand regret de ma très superficielle personne. Les gens difficiles, au nom de l’amitié même qu’ils me portent (comme Du Méril, par exemple), ont re-

  1. L’Amour impossible.