Page:Barbey d’Aurevilly - Premier Memorandum, 1900.djvu/42

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

tu me reverras au milieu du monde, ne me regarde plus et écoute-moi moins encore. Ce n'est pas ainsi que j'étais autrefois, ce n'est pas ainsi que tu m'as aimé. Le monde ne m'a appris qu'à être un esprit léger et frivole. Pour vivre avec ses favoris et à l'abri des coups trop tôt reçus, il m'a fallu railler sur tout et mentir avec grâce, il m'a fallu me croiser quatre griffes de lion sur le sein.

Ii quand tu me reverras seul, ne cherche point dans l'amer dédain du sourire les vestiges d'un changement qui ne menace pas ton amour. Je serai heureux auprès de toi, — heureux d'un bonheur comme tu sais le donner, quoique je l'aie reçu avec plus d'ivresse. Ce n'est ni ta faute, ni la mienne, si les jours passés ne sont plus. En s'en allant, ils ont emporté toutes les joies, n'en laissant qu'une, mais la rendant amère, celle-là, — que ni le temps, ni le monde, ne pourrait à présent nous ravir.

Iii ô