Page:Barbey d’Aurevilly - Une histoire sans nom, 1882.djvu/170

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tinée ressemblât à la destinée de Lasthénie, sur qui la nuit, la peur et la mort entassaient leurs triples ténèbres, pour cacher à jamais l’enfant sans nom de cette lamentable histoire sans nom ?…

Et la nuit, — la sombre et longue nuit, — la nuit aux angoisses, — aux inoubliables angoisses n’était pas finie pour madame de Ferjol. Il y en avait une encore, de ces angoisses, à dévorer… L’enfant était venu mort, affreux bonheur ! Mais le cadavre ?… que faire de ce cadavre, le dernier indice accusateur de la faute de Lasthénie ? Comment le faire disparaître ? Comment effacer le dernier vestige de cette honte, pour que tout, de cette honte, excepté dans leurs deux âmes, fût anéanti ?… Elle y pensait, madame de Ferjol ; et ce qu’elle pensait, l’effrayait ; mais c’était une organisation normande et de race héroïque. Elle pouvait avoir le cœur terrifié ou déchiré, elle commandait à son cœur ; et toujours, elle faisait, en tremblant, ce qu’elle avait à faire, comme si elle eût été impassible. Pendant le sommeil où tombent les nouvelles accouchées et dans lequel tomba