Page:Barbier - Iambes et Poèmes, 1841.djvu/280

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


Je conçois ce que vaut pour l’âme droite et pure,
Pour le cœur déchiré par l’ongle de l’injure,
Pour un amant du bon et du beau, dégoûté
Des fanges de la ville et de sa lâcheté,
Le sauvage parfum de ma rustique haleine ;
Je conçois ce que vaut la douceur souveraine
Des vents sur la montagne à travers les grands pins,
La beauté de la mer aux murmures sans fins,
Le silence des monts balayés par la houle,
L’espace des déserts où l’âme se déroule,
Et l’aspect affligeant même des lieux d’horreur,
Où le cœur se soulage et qui parlent au cœur.
Aussi, pour rassurer ton âme, ô mon poëte !
Et pour te consoler, je ne suis point muette ;
Bien que le livre obscur du lointain avenir
Ne puisse sur mon sort devant toi s’entr’ouvrir ;
Que, dans le mouvement d’une vie incessante,
Un bandeau sur les yeux je conçoive et j’enfante,
Je puis crier pourtant, et les sublimes voix
Qui s’élèvent des monts, des ondes et des bois,