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TOMYRIS,
Mandane.

Soûtiens moi.

Artabase.

Soûtiens moi. Quelle horreur ! Le flambeau qui nous luit
A-t-il pu l’expoſer aux yeux de la nature ?
Mais comment vous tracer cette affreuſe peinture ?

Mandane.

Artabaſe, achevez, & ne m’épargnez pas,
Je veux ſuivre Cyrus dans la nuit du trépas.
Je l’ai perdu ; la mort eſt tout ce qui me reſte ;
Et je dois la chercher dans ce récit funeſte.

Artabase.

Et je devrois, Madame, en me perçant le flanc,
Au defaut de ma voix, faire parler mon ſang.
La victoire pour nous hautement déclarée,
Déja de vos priſons nous permettoit l’entrée,
Quand j’ai vu Tomyris un poignard à la main,
Pour aller à Cyrus prendre un autre chemin.
J’ai tremblé, j’ai ſuivi ſa furieuſe eſcorte ;
J’arrive au lieu fatal, on m’en défend la porte,
On m’arrête, le ſang coule de toutes parts :
Des Scythes effrayés je force les remparts,
Tout fuit ; j’avance enfin, l’ame de crainte émue.
Juſtes Dieux ! quel objet vient s’offrir à ma vue
Mes Soldats conſternés en pouſſent mille cris.
Une troupe barbare entoure Tomyris,
Tandis que par trois fois, ſans qu’aucun cri l’arrête