Vous vous troublez, Madame, & vous versez des larmes.
Helas ! si vos desseins sont trahis par le sort…
Mourant pour mon pais, vous pleureriez ma mort ?
Ah ! montrez-vous, de grâce, une ame plus Romaine,
Et ne me forcez pas à rougir de ma chaîne ;
Laissez les vains regrets aux vulgaires Amans,
Vous devez à Brutus de plus hauts sentimens.
Et comment sans regret songer que c’est moi-même
Qui viens de vous jetter dans ce péril extrême ?
J’ai pris soin, que ne peut une Amante en couroux ?
D’inspirer au Tyran des soupçons contre vous ;
Ma bouche ne prenant que ma fureur pour guide,
Vous a peint à ses yeux sous les traits d’un perfide.
Peut-être en ce moment les Dieux m’ont fait parler,
Pour lui montrer la main qui devoit l’immoler ;
Puis-je voir sans frémir à quoi je vous expose,
Et si vous périssez, que j’en serai la cause ?
César de tous vos soins prêt à se défier…
Gardez dans son esprit de me justifier ;
Ou plutôt affectant une haine implacable,
A ses yeux, s’il se peut, peignez-moi plus coupable ;
Deguisez votre cœur pour mieux fraper le sien,