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Page:Barbier - Théâtre, 1745.pdf/97

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EPITRE.

Quelle bonté de cœur ! quelle nobleſſe d’ame !
Pour le bonheur de tous quel zéle vous enflamme !
Princesse, rien n’échape à vos ſoins généreux,
Et l’on vous attendrit dès qu’on eſt malheureux :
C’eſt à cette vertu par tout ſi bienfaiſante,
Qu’il faut que Cornelie à ſon tour ſe préſente :
Le ſort lui fait trouver, pour premiere faveur,
Son amour pour le peuple au fond de votre cœur.
A cet objet touchant, cette illuſtre Romaine
Se retrace le Tibre aux rives de la Seine ;
Tout flatte ſon erreur, & tout ſemble d’accord
A la faire en ces lieux revivre après ſa mort.
Mais que lui ſervira de reprendre la vie,
Si c’eſt pour ſuccomber ſous les traits de l’envie ?
Oui, quand elle n’auroit que l’honneur d’être à vous,
Princesse, un ſort ſi beau lui fera des jaloux.
Pour calmer ſa frayeur, ſoutenez ſa querelle,
Elle ne craint plus rien ſi vous êtes pour elle :
Votre diſcernement eſt ſi juſte & ſi fin,
Que votre ſeule voix reglera ſon deſtin.
Pour moi, qu’un beau motif dans ſa gloire intereſſe
Je me jette avec elle aux pieds de Votre Altesse.
Mais quand je vous demande un favorable aveu,
Puis-je bien ſans rougir le mériter ſi peu ?
Je ſçai trop qu’on dira qu’un ſi noble ſuffrage
Eſt le prix de mon zele, & non de mon Ouvrage ;
N’importe : aux yeux de tous il oſe s’expoſer,
Et votre nom ſuffit pour l’immortaliſer.