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Page:Barbusse - Le Feu : journal d’une escouade.djvu/141

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rand, le ministre de la Guerre, a dit aux députés : « Il n’y a pas d’embusqués. »

— Millerand, grogna Volpatte, mon vieux, je l’connais pas, c’t’homme-là, mais, s’il a dit ça, c’est vraiment un salaud !

— Mon vieux, les autres, i’s font c’qui veul’t dans leur pays, mais chez nous, et même dans un régiment en ligne, y a des filons, des inégalités.

— On est toujours, dit Bertrand, l’embusqué de quelqu’un.

— Ça c’est vrai : n’importe comment tu t’appelles, tu trouves, toujours, toujours, moins crapule et plus crapule que toi.

— Tous ceux qui chez nous ne montent pas aux tranchées, ou ceux qui ne vont jamais en première ligne ou même ceux qui n’y vont que de temps en temps, c’est, si tu veux, des embusqués et tu verrais combien y en a, si on ne donnait des brisques qu’aux vrais combattants.

— Y en a deux cent cinquante par régiment de deux bataillons, dit Cocon.

— Y a les ordonnances, et à un moment, y avait même les tampons des adjudants.

— Les cuistots et les sous-cuistots.

— Les sergents-majors et le plus souvent les fourriers.

— Les caporaux d’ordinaire et les corvées d’ordinaire.

— Qué’ques piliers de bureau et la garde du drapeau.

— Les vaguemestres.

— Les conducteurs, les ouvriers et toute la section, avec tous ses gradés, et même les sapeurs.

— Les cyclistes.

— Pas tous.

— Presque tout le service de santé.

— Pas des brancardiers, bien entendu, puisque non seulement i’s font un foutu métier, mais qu’i’s s’logent,