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AUGUSTA HOLMÈS ET LA FEMME COMPOSITEUR

par intérêt ou par sottise et snobisme, on accorde à tous ceux qui portent le nom d’artiste ; le jour où public, et surtout journalistes, ne flatteront plus à outrance de ternes représentants de notre grand art, les « imitations » disparaîtront comme des mouches à qui on enlève toute pâture, et les « vrais » bénéficieront d’une sympathie sans arrière-pensée et de la franche admiration dont ils sont dignes entre tous. Oh ! je sais que la culture d’un art, quel qu’il soit, et les dispositions y correspondant, dénotent quelque supériorité dont la musique n’a pas le monopole. La science recrute aussi des adeptes. Comparez pourtant l’ensemble des artistes musiciens avec la généralité d’écrivains, de comédiens, de peintres ; à moins d’exception ou de raisons partiales opposées à ma thèse, vous reconnaîtrez que les musiciens l’emportent en tenue, en dignité, en valeur morale, parce que l’art qui les guide est l’art le plus pur.

Tandis que la littérature recèle si souvent un foyer de corruption pour l’écrivain et pour le lecteur ou l’auditeur, quelle que soit la valeur de l’œuvre, souvent même à cause de sa valeur ; tandis qu’avec une excuse analogue mais plus sincère, la peinture ne tient aucun compte de la décence ou, pour échapper à la banalité, tombe facilement dans un réalisme brutal laissant une impression toute contraire de réconfortante, la musique prédispose uniquement aux aspirations élevées et nous charme sans servir aucun mauvais penchant. Je ne sais comment on l’a parfois traitée d’art « sensuel », c’est le plus chaste, c’est le plus sain, s’il n’est pas déformé