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AUGUSTA HOLMÈS ET LA FEMME COMPOSITEUR

nous, César Franck semble un apôtre ; Berlioz, malgré une irritation douloureuse provenant d’une extrême sensibilité exaspérée par de cruelles injustices, ne s’abaisse jamais et nous émeut comme un sympathique héros. Chopin, guetté par la mort et martyrisé par la vie, demeure une figure da tendresse, de charme et de poésie, qui, pas une fois, ne nous attriste par une faiblesse, ainsi que le fit notre adorable Musset. Il faudrait en nommer beaucoup d’autres ! Je cite encore Antoine Rubinstein, dont tout à l’heure j’évoquais le souvenir. Nul n’était plus joueur que lui, et l’argent, qu’il gagnait à profusion, s’évanouissait sur les tapis verts ; du jour où il se maria, il ne toucha les cartes qu’en partie d’amis sans un centime d’enjeu. Mais sa charité ne se dérobait jamais. Lors d’une série de concerts lui rapportant cinq cent mille francs, il laissait cent mille francs pour les pauvres ; un jour il fit cette réponse typique à son secrétaire lui signalant une foule de demandes d’aumônes en l’engageant à n’en point tenir compte : « Si, si, donnez à tous, et pas trop peu ».

Avec Wagner il faut un peu séparer l’homme de l’artiste, mais quelle admirable intelligence, quelle énergie, quelle organisation, quel véritable surhomme ! D’ailleurs, en général, les musiciens sont supérieurs, non seulement moralement mais intellectuellement, et leurs connaissances, leurs aptitudes, en dehors du don musical, s’affirment remarquables. Beaucoup écrivent à faire pâlir les meilleures pages de professionnels de la plume ; Berlioz se montre hors ligne, on a de lui