Page:Barine - Alfred de Musset, 1893.djvu/48

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appris par la voix publique qu’elle avait un neveu poète, et elle reprochait aigrement à M. de Musset-Pathay de lui avoir attiré cette disgrâce. Elle avait toujours blâmé son frère de trop aimer la littérature ; il voyait à présent où cela conduisait.

Le pardon des injures ne figurait pas dans son credo. En châtiment des Contes d’Espagne et d’Italie, la chanoinesse « renia et déshérita les mâles de sa famille pour cause de dérogation », et la première édition était pourtant expurgée ! On en avait supprimé la conversation impie de Mardoche avec le bedeau.

Cependant Musset lisait les journaux avec beaucoup de calme et d’attention. Il ne s’indignait pas. Il ne traitait pas les critiques de pions et de cuistres. Il ne désespérait pas de la littérature et de l’humanité. « La critique juste, disait-il, donne de l’élan et de l’ardeur. La critique injuste n’est jamais à craindre. En tout cas, j’ai résolu d’aller en avant, et de ne pas répondre un seul mot. »—M. de Musset-Pathay, aussi attentif et moins calme, écrivait à un ami, à propos de l’article si cruel de l'Universel : « Mes inquiétudes sur les disputes possibles n’étaient heureusement pas fondées, et j’ai su avec une surprise extrême le stoïcisme de notre jeune philosophe. Je sais du seul confident qu’il ait[1] et qui le trahit pour moi seul, qu’il profite de toutes les critiques, abandonne le genre en grande

  1. Son frère Paul.