Page:Barine - Alfred de Musset, 1893.djvu/89

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tes bons moments. Ce n’est plus cette amitié pure dont j’espérais voir s’en aller peu à peu les expressions trop vives…. » Elle lui expose l’état pénible de ses relations avec Pagello : « Tout, de moi, le blesse et l’irrite, et, faut-il te le dire ? il part, il est peut-être parti à l’heure qu’il est, et moi, je ne le retiendrai pas, parce que je suis offensée jusqu’au fond de l’âme de ce qu’il m’écrit, et que, je le sens bien, il n’a plus la foi, par conséquent, il n’a plus d’amour. Je le verrai s’il est encore à Paris ; je vais y retourner dans l’intention de le consoler ; me justifier, non ; le retenir, non…. Et pourtant, je l’aimais sincèrement et sérieusement, cet homme généreux, aussi romanesque que moi, et que je croyais plus fort que moi. »

Ils continuèrent pendant tout le mois de septembre à se dévorer le coeur et à se torturer mutuellement. Aucun des deux n’avait la force d’en finir. Octobre les rapprocha, et ils se remirent à essayer de croire, à s’efforcer d’avoir foi l’un dans l’autre et dans la vertu purifiante de l’amour. Les jours s’écoulèrent dans des alternatives harassantes. Musset, qui avait gardé de son passé moins d’illusions que George Sand, sentait la nausée lui monter aux lèvres au milieu de ses serments d’amour. Son dégoût se tournait en colère ; et il accablait son amie d’outrages. A peine l’avait-il quittée, que la réalité s’effaçait de devant ses yeux ; il n’apercevait plus que la chimère enfantée par leurs imaginations enflammées. Il obtenait sa grâce à force de désespoir et