Page:Barrès - La Colline inspirée, 1913.djvu/187

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Ah ! Dieu ! je suis pris
S’ils nous trouvent ici.

Ce vieux chant populaire, où s’exprimait jadis la détresse des paysans du duc Charles IV foulés par les Suédois, les Baillard l’ont retrouvé, et tout spontanément le prennent pour chant de guerre. Cette plainte villageoise et guerrière leur plaît par son caractère de méfiance et d’hostilité contre l’étranger. Le sentiment profond qui les anime y trouve une forme saisissante. La sœur Thérèse les enflamme tous quand elle chante, avec l’accent des paysans qui voient apparaître sur l’horizon une petite troupe d’inconnus :

Filles et pâtureaux,
C’est pas le moment de parler ;
Vite, au plus tôt, courez parmi les champs
Pour ramasser nos troupeaux tout d’un temps.
Envoyez le chien BrissaudEt vous, Fidèle,
Pour les faire retourner
Pendant que je ferai la sentinelle.
Car je serai pris, S’ils nous trouvent ici.

Mais les bergers se rassurent : il y avait une méprise, Ce ne sont pas les terribles soudards de Gustave-Adolphe qui arrivent, ce sont les Rois Mages, et tout le monde part d’un grand rire quand sœur Euphrasie chante à son tour :