teurs de Billancourt !… Sturel songe avec une volupté égoïste que leur bonheur s’évaporera dans la vie comme ce parfum dans le courant d’air de la Seine. Le sentiment que de tels instants ne peuvent être fixés leur ajoute une force de mélancolie qui le tint longtemps silencieux.
Les vieilles dames, auprès de qui les deux jeunes gens sont remontés, causent de Victor Hugo, dont les journaux depuis quatre jours disent la santé inquiétante : un vieillard de quatre-vingt-trois ans, et le cœur hypertrophié, supportera mal une congestion pulmonaire. Sturel s’entête à considérer que le héros qui maintient le mieux l’unité française ne voudra pas abandonner la patrie avant qu’un homme ou une passion dominante puisse tenir l’emploi qu’en mourant il déserterait. Les dames se mettent à parler de la fraîcheur, car elles sont à l’âge où les paysages lunaires, sans cesser d’agir sur l’organisme, n’y mettent plus d’inquiétudes, que rhumatismales. Mais la soirée est chaude. On file le long du quai jusqu’à Boulogne, pour rentrer par le Point-du-Jour. Chacun jouit du bien-être, et toute conversation s’est tue, quand madame Alison soudain se penche et dit :
— Oh ! la pauvre dame ! Si elle espère trouver ici une voiture !…
Sur le côté du chemin, une femme, en effet, de silhouette élégante, avec son ombrelle, fait signe au cocher. Deux individus l’accompagnent, qui ne s’associent pas à ses signaux, mais se tiennent plutôt à l’écart… C’est un petit tableau qu’à l’appel de madame Alison chacun depuis le landau entrevoit ; et, si le geste d’un piéton qui fait un vain appel est le plus banal des rues de Paris, à cette heure, dans ce