incessant, et tous ses efforts tendent vers cette voix invisible :
Celle là-bas qui le hêlait
Dans les brumes hurlait, hurlait,
La tête effrayamment tendue
Vers l’inconnu de l’étendue.
C’est donc en état de fièvre, avec colère, avec folie, étonné, épouvanté, halluciné, que Verhaeren enregistre ses illuminations soudaines sur le mystère dont la vie est l’apparence tourmentée.
De cette esthétique découle un rythme ardent, brutal et
sauvage, qui rappelle, avec plus d’âpreté, les emportements
passionnés d’Hugo. Verhaeren manie l’antithèse avec une
adresse prestigieuse en parfaite harmonie avec la violence
des sentiments qui l’émeuvent. Son poème de la Statue
[1],
porte le cachet du meilleur romantisme :
On lui prit sa pensée et l’on en fit des lois ;
On lui prit sa folie et l’on en fit de l’ordre,
Et ses railleurs d’antan ne savaient où mordre
Le battant de tocsin qui sautait dans sa voix.
Il ajoute encore à l’effet par un martellement emporté qui,
d’autorité, vous enfonce dans la tête et l’image et l’idée. Les
allitérations brutales s’entremêlent alors avec assez de
bonheur pour immensifier la vision du poète :
La mer choque ses blocs de flots contre les rocs
Et les granits des quais, la mer spumante
Et ruisselante et détonnante en la tourmente
De ses houles montantes[2].