Page:Barrucand - Avec le Feu, 1900.djvu/18

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et navrantes, des chutes et des récidives. Une humanité de conseils de révision passait sous la toise légale. Dans cette Bourse de la morale la société tenait son livre et chicanait les débiteurs insolvables. L’incohérente exhibition des misères et des vices y alternait avec l’éloquence finaude et bredouillante. Assis à ces comptoirs, des hommes mûrs, chargés de corriger l’espèce, besognaient, grossoyaient, en toute indifférence, professionnellement, somnolaient, béaient, tournaient d’un doigt sec les feuillets des codes, ou, l’œil au cadran, pensaient à des affaires plus sérieuses — les leurs.

Les portes des chapelles correctionnelles battaient fréquemment : on y chuchotait des aveux, on y vociférait des appels à la pitié, on y potinait, on y rabâchait des principes, du droit et de la jurisprudence ; et cela se soldait en fin de compte par de bonnes amendes trébuchantes, des frais bien établis et des pénitences sans repentir. Cette maison sociale donnait l’idée d’un ancien temple où les idoles sont mortes de vieillesse, mais toujours affairé pourtant, avec son peuple bien remuant de desservants, ses rites, ses costumes, ses privilèges,