Page:Barrucand - Avec le Feu, 1900.djvu/231

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À table, la conversation continua. M. Vignon mangea bien, parla beaucoup, en vieil enthousiaste assez exclusif.

Meyrargues n’était point sans remarquer les taquineries de Laure, malicieuse et contente de se trouver à côté de lui, chez elle, sur son terrain ; mais, contre son ordinaire, il se défendait mal, cédait, se montrait triste, un peu résigné et conciliant. Sa belle figure d’homme fatigué semblait ennoblie d’un deuil.

Laure s’en aperçut sur une réplique abandonnée. Elle en fut impressionnée, et, vivement, s’enquit de Robert ; car elle savait l’affection que Meyrargues lui portait.

Cette question, et plus encore le ton de sympathie soudaine sur lequel elle fut faite, ouvrirent les yeux de Meyrargues. Ses soupçons se confirmaient. Un singulier malaise d’amour-propre le fit pâlir et balbutier :

— Robert ?… Il est vrai que vous m’aviez recommandé de l’amener ce soir…

Laure observait son trouble et s’y trompa. Un horrible soupçon la fit tressaillir.

— Quand l’avez-vous vu ?… Je veux dire : l’avez-vous vu depuis lundi ?