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Conspiration des Sophistes

de rimer l’imitation de J. C., et ne tirez que de votre propre fonds ce que vous avez à nous dire. On peut parler de fables, mais seulement comme fables ; et je crois qu’il vaut mieux garder un silence profond sur les fables chrétiennes, canonisées par leur ancienneté et par la crédulité des gens absurdes et stupides. » (Lettre 53, an 1738.)

Déjà on voit par ses premières lettres, qu’avec le ridicule orgueil d’un roi pédant, il aura toute la mobilité et même toute l’hypocrisie des Sophistes. Frédéric donne des leçons à Voltaire contre la liberté, quand Voltaire la défend ; (Voyez leurs lettres en 1757) et quand Voltaire ne voit plus que l’homme machine, Frédéric ne voit plus que l’homme libre. (Voyez sa lettre du 16 Septembre. 1771.) Ici il soutiendra qu’il y a nécessairement une liberté, précisément parce que nous en avons une idée nette ; (ibid.) et ailleurs il voudra l’homme toute matière, quoiqu’il n’y ait pas d’idée plus ténébreuse que celle de la matière libre et pensante ; ergotisante, même à la façon de Frédéric. (Voyez sa lettre du 4 Décembre 1773.) Il a repris Voltaire de sa dissimulation dans des louanges données à J. C. et il ne rougit pas d’écrire trois ans plus tard : « Pour moi, je vous avoue (s’il faut s’enrôler sous la bannière du fanatisme) que je n’en ferai rien, et que je me contenterai de composer quelques Pseaumes pour donner bonne opinion de mon orthodoxie… Socrate encensoit les Pénates ; Cicéron, qui n’étoit pas crédule, en faisoit autant ; il faut se prêter aux fantaisies d’un peuple futile, pour éviter la persécution et le blâme. Car, après tout, ce qu’il y a de plus désirable en ce monde, c’est de vivre en paix. Faisons quelques sottises avec les sots, pour arriver à cette situation tranquille. » (Lettre du 6 Janvier 1740.)

Ce même Frédéric, partageant la haine de son