Page:Barry - Chroniques du lundi, 1900.djvu/253

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Comprend-il bien tout ce que notre cœur contient d’abnégation ? Pendant qu’il vaque à ses affaires au dehors, qu’il cause gaiement avec les amis qu’il rencontre dans la rue, sa femme range sa maison avec ordre, et c’est uniquement pour lui qu’elle met son intérieur propre et coquet ; elle veille à ce que le dîner soit cuit à point ; dans le choix des mets, ce n’est pas son goût qu’elle consulte, mais le sien ; enfin, rien ne saurait égaler sa touchante sollicitude et son renoncement, qui s’affirme partout. C’est tout cela que mon fils ne devra pas ignorer…

Avec quel plaisir je l’écoutais, tandis qu’elle pétrissait, de ses mains blanches et nerveuses, la pâte légère servant à la confection des petits pains chauds, que l’on servirait au déjeûner, selon la mode américaine.

— C’est beaucoup d’ouvrage, me dit-elle, répondant à une pensée qu’elle lisait dans mes yeux, et je n’y ai été guère habituée par mes luxueuses habitudes de jeune fille. Mais la fatigue, je ne la compte pas, et, ajouta-t-elle avec un fin sourire :

Avec deux bons baisers demain
On vous paiera de votre peine…

C’est encore ma meilleure récompense.

Moi, je pensais en l’entendant parler :

— Combien de femmes ressemblent à celle-ci !


Lundi, 19 novembre.

J’ai assisté dernièrement à la célébration d’un mariage syrien.

La cérémonie a eu lieu à cinq heures de l’après-midi, dans la chapelle du Sacré-Cœur, de l’église Notre-Dame et, bien que la chose ait été gardée aussi secrète que possible afin d’éviter la foule, nombre de curieux,