Page:Barry - Chroniques du lundi, 1900.djvu/73

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on pourrait même, ajoute-t-on, citer quelques noms bien connus dans le monde des lettres qui en font largement usage.

Et que ne cite-t-on pas ? Mais qu’ils en soient pour leur honte, et restent marqués au front, comme d’un stigmate, du mépris des gens de bien.

C’est une monstruosité que de spéculer ainsi sur le talent d’autrui pour aider et grandir le sien. Il y a dans ce trafic quelque chose de déloyal qui révolte et répugne toute âme droite.

On a déjà remarqué qu’après la mort de certains romanciers populaires, il surgissait tout à coup une série d’œuvres inédites qui eussent demandé à l’auteur, pour les produire lui-même, deux fois autant que la durée de son existence.

J’avais lu cette remarque à propos des œuvres, soi-disant posthumes, d’Alexandre Dumas père, de Ponson du Terrail, etc.

J’ai pu juger de la vérité de cette assertion en constatant, moi-même, que, depuis la retraite de Guy de Maupassant, un nombre prodigieux de nouvelles inédites signées de son nom, sont publiées presque chaque jour, dans les revues parisiennes.

Leur authenticité pourrait être mise en doute même par les gens dont la foi est encore robuste.

Combien il y a loin de ces Shylocks modernes à ces grands et nobles cœurs qui, croyant rencontrer sur leur route un talent réel, lui tendent la main, pour l’encourager, lui ouvrent le chemin du succès, et se servent de leur nom, oui, mais seulement pour couvrir les jeunes débutants d’un peu de leur gloire et les protéger d’une manière plus efficace.

Les frères de Goncourt, — qui viennent justement de publier le sixième volume de leurs mémoires, — le dernier à publier pendant leur vie, ont réglé par leurs disposi-