Page:Barry - Chroniques du lundi, 1900.djvu/8

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cause et les bons mots se croisent pétillants comme une fine mousse de champagne.

Le long des murs et des lourds piliers, loin des centres tapageurs, des amoureux se sont rejoints, et se promènent à petits pas, parlant tout bas et lentement, Dieu sait de quelles insignifiances, mais heureux, satisfaits, le paradis dans le cœur.

Plus tard, dans quelques années, quand aux sons majestueux de l’orgue, les célébrants entonneront, au milieu des flots d’encens, devant un peuple à genoux, les graves antiennes liturgiques, il se trouvera quelque jeune femme qui, frôlant de sa main gantée le bras de ce monsieur en tenue digne à ses côtés, lui dira :

— T’en souvient-il, Henri ? C’était là, tu sais, là que tu m’as dit…

Mais lui, froid, correct, sévère, l’interrompra d’un geste. Il y a des redites qui peuvent être fort gênantes quand les circonstances ne sont plus les mêmes.

Pourtant, oui, il se souvient, lui aussi.

Pendant quelques instants, les autels, les longs cierges, les blancs surplis disparaissent à ses yeux ; il ne revoit plus que les buffets chargés de fleurs et de bibelots, une foule bruyante qui circule et là-bas, où sont maintenant ces gros anges joufflus en adoration, lui et elle, égrenant ensemble, d’une voix émue, les litanies de l’amour… Ah ! le temps si beau de folies si bêtes !

Une installation de tous les temps et où il se fait toujours un bon débit, c’est celle des crèmes à la glace. Tout le monde y vient, depuis les bonnes mamans qui ne craignent pas d’ajouter des glaces aux neiges de leurs cheveux, jusqu’aux bambins, comparant leurs verres entr’eux, pour savoir lequel est le plus rempli.

Les jeunes gens y conduisent galamment les dames, mais, puisque mon impartialité de chroniqueuse m’oblige à tout dire, je dois ajouter, que, sur le nombre, quelques-