Page:Barry - Chroniques du lundi, 1900.djvu/98

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sympathie, et me serra la main, mais elle était si émue que je la sentais incapable d’articuler une parole.

Quelques instants plus tard, un beau et musculeux jeune homme, un chevalier à la verte armure, couvert de poussière, le visage encore ruisselant de sueurs, fendait la foule pour s’approcher de l’endroit où nous étions.

L’excitation n’avait pas encore diminué. On se serrait la main, on se félicitait, on se heurtait et se bousculait en regagnant les issues.

Mais, lui, ne voyait plus qu’elle, et, elle, lui. Tout le reste avait disparu à leurs yeux, et, se levant de son siège pour aller à sa rencontre, elle lui donna la plus belle récompense qu’un vainqueur puisse rêver,

 :… ce collier qui manque un rang suprême
 :Les deux bras d’une femme aimée — et qui vous aime.

Discrètement, je détournai les yeux et m’ensauvai.

Pour un rien, j’aurais pleuré comme elle.


Lundi, 31 octobre.

La veille de la Toussaint ! Brrr… qu’il fait froid !

Pas ce froid de la température qui vous saisit à la figure, aux mains, aux pieds, mais cet autre froid qui glace l’âme, étreint le cœur et vous met dans la tête les idées les plus ternes et les plus sinistres.

C’est le temps des ciels mornes, des bises sifflantes, des pluies glaciales et des brouillards épais.

C’est l’automne, « l’automne aux tristes jours », dit la chanson, qui mesure du même coup l’éternité de l’amour à la durée des rose".

Hélas ! est il bien sûr que quelques amours durent aussi longtemps !