Page:Barthe - Similia similibus ou la guerre au Canada, 1916.djvu/153

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— Pas colonel… lieutenant, dit sèchement le Prussien.

— Ah !… Eh ben, m’sieu le capitaine, comprenez, nous autres, on est des bons vieux Canayens, de père en fils ; on est dans le pays, su’nos terres, depu’deux cent cinquante ans. Vous pouvez voir nos titres au bureau d’enregistrement. Moé pour un, j’ai le numéro 201 du cadastre, qui me vient de mon grand grand-père. Pour lors, vous n’êtes pas pour nous déranger, est-ce pas ?

Biebenheim eut un petit rire méchant. Tapant sur l’épaule du beau parleur, il répondit :

Cela tépend… Fos titres, fotre catastre, nous ne connaissons pas ça. Sachez que tout ce qu’il y a tans le pays, fos terres, fos maisons, tout est entre nos mains.

— Mais, m’sieu, se récrie l’autre, si vous me dépossédez, qu’est-ce que je deviendrai, moé ?

— Fous, dit Biebenheim en le toisant curieusement des pieds à la tête, fous êtes pien pâti, fous ferez un peau soltat.

— Et ma femme ! mes filles ! gémit l’avocat du village, en reculant épouvanté.