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LA JOIE DE VIVRE

Pourquoi dit-on indifféremment : le jour tombe, ou la nuit tombe ? On a ici l’explication de cette apparente confusion de mots.

Au delà des coteaux qui bloquent l’horizon à l’Occident, c’est bel et bien le jour qui dégringole, entraîné dans les feux du soleil couchant ; en deçà, c’est la nuit qui au même moment s’abat sur le paysage.

La poussière impalpable qu’elle secoue dans l’espace gaze d’abord le fond des vallées. Ici, le fond de la vallée est un large bras de fleuve, dont le miroir se dépolit à vue d’œil ; bientôt, sous cette grisaille tombante, ses eaux se plombent, s’imprécisent ; on ne distingue déjà plus leurs reflets argentés des gros cailloux et des récifs grisâtres que le reflux, ou plutôt le « baissant » comme on dit ici, met à sec entre les deux rives.

Puis le phénomène se met à opérer en sens contraire. Le nimbe d’or du coucher de soleil étant tout à fait disparu derrière les monts, ne laissant derrière lui qu’un crépuscule qui se décolore d’un instant à l’autre, on peut maintenant dire que, si le jour baisse, la nuit monte.