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est celui qui croit que les lis fleuriront jamais sur la racine de la fougère, ou que l’or tombe du haut des arbres. Du haut des arbres il ne tombe rien que des feuilles sèches, que des feuilles jaunies pour faire le lit des pauvres gens. » Et ils ajoutent, en élevant au ciel leurs yeux qu’éclaire l’Espérance, sœur de la Foi : « Chers pauvres, consolez-vous, vous aurez un jour, au lieu de lits de branches, des lits d’ivoire et de plumes dans un monde meilleur[1] »

Telle est la conclusion de tous leurs discours ; ils la reproduisent sous mille formes ; ils ne passent guère de jour sans la répéter, ou sans chanter ces autres paroles si touchantes et si belles : « Hélas ! les cœurs bretons sont remplis de tristesse[2] !... Notre sort est misérable ; notre étoile, funeste ; notre état, bien pénible : repos ni jour ni nuit ! mais prenons-le en patience pour mériter le paradis[3]. »

Le paradis ! voilà en effet le but de leurs désirs, comme de ceux du chrétien ; voilà le mot magique qui leur enseigne la patience, la confiance en Dieu, la pitié pour les misères d’autrui. l’obéissance à toute loi juste, fût-elle dure, l’espoir d’une récompense éternelle. Ce mot, qui est pour eux toute la religion, calme leur douleur, et l’on dirait, à la sérénité de leurs regards, qu’il lui prête même des charmes.

La religion seule embellit quelque peu leur vie de chaque jour : elle les rend gais, d’une gaieté calme et tempérée; elle les rend bons et sociables ; elle vient, comme un ami grave et honoré qui partage les goûts de la famille, s’asseoir à leur foyer ; elle prend les enfants sur ses genoux, et, joignant leurs petites mains, elle leur enseigne cette prière sublime :

« Mon Dieu, faites-moi la grâce d’être un honnête homme, ou faites que je meure avant l’âge[4] ! »

Elle leur prêche le respect pour les gens d’Église, pour les propriétaires, pour toutes les personnes d’une condition su-

  1. T. 11. p. 283.
  2. Ibid., p. 373.
  3. Ibid., p. 221.
  4. Ibid., p. 343.