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DE MARIE BASHKIRTSEFF.

nifestations sont dans l’ordre des choses et Dieu ne s’en offense pas, et l’homme ne s’en offense pas non plus, sentant que ce sont là les conséquences naturelles et inévitables de la douleur qu’on éprouve. On gémit, mais on

que cela ne doit pas étre ; sans s’en apercevoir, on l’accepte.

Il arrive qu’on s’isole, qu’on se cloilre après. Vous entendez bien, après ? Il arrive aussi, souvent, qu’on se trouve heureux tout seul, c’est-à-dire homme ou avec les parents auxquels on songe et pour lesquels on vit ; mais moi, je parle pour les sonnes toutes seules… D’ailleurs, aujourd’hui j’ai pris ma famille en grippe comme une des causes de mes souffrances. Et puis, je ne parle pas pour les silencieux et inconnus héros décrits dans les romans par des gens qui les inventent ou les copient sur nalure, pour ne crie pas au fond de l’âme avec

un perne

pas rester comme eux. Vous vous figurez que je me plains d’une vie calme et désire le bruit ? May be, mais ce n’est pas cela. J’aime la solitude et je crois même que si je vivais, je m’isolerais de temps en temps pour lire, méditer, me reposer ; alors, c’est un charme, un bonheur doux et exquis. Par lesgrandes chaleurs, vous êtes enchanté de vous fourrer dans une cave ; mais y rester longtemps ou toujours !

Maintenant, si quelqu’un de malin voulait se donner la peine de me confondre, il me demanderait si je consentirais à acheter la vie par la mort de ma mère, par exemple. A cela, je répondrais que je ne le voudrais même pas au prix d’une vie moins chère, puisque, d’après la nature, la mère est ce qu’on aime le plus. J’aurais des remords affreux, je ne voudrais pas par égoïsme.