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JOURNAL

le prince impérial. Ils vont croire que j’ai les yeux. rouges pour Paul, les idiots ! Chacun a ses intérêts ici-bas : lui, c’est sa fiancéc, l’amour, une petite terre et Poltaya ; moi, c’est autre chose, autre CIOSE qui semble contenir tout ce que je désire et tout ce qui me manque, toutes les jouissances humaines, tout le bonheur, toutes les revanches. Encore un an, alors, quand pour moi, plus que pour quiconque au monde, la vie est une course ! Lundi 15 mars.-Drames inutiles. Tout est arrangé ; samedi on a reçu des dépêches rassurantes. Il n’y a rien de grave.

J’ai écrit à Tony pour qu’il vienne, et j’ai très peur. J’ai si peur de ce que dira Tony, il me semble que c’est si présomptueux à moi d’exposer, bien que Julian ait dit que s’il n’y avait que des exposants de ma force ce serait bien heureux. Il me semble que je serai anéantie de honte quand il viendra voir le tableau ; je ne sais pas si j’oserai, et pourtant je ne pourrai pas m’en aller s’il vient. C’est incroyable que ce soit moi qui dise cela, et voyez pourtant ! Si je disais cela tout haut, on croirait que je blague. Vendredi 19 mars. — A midi moins le quart, Tony 1 Pourquoi n’ai-je pas commencé plus tôt ? c’est très joli, c’est ravissant, quel dommage, etc., etc. ; en somme, il me rassure, mais il faut demander un sursis. — On peut l’envoyer tel quel, mais ce n’est pas la peine, « voilà mon opinion sincère, intime. » Demandez un sursis et vous ferez quelque chose de bien. — Alors il retrousse. ses manches, prend la palette et promène des balayages un peu partout pour me faire comprendre que mon affaire manque de lumière. Mais je