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DE MARIE BASHKIRTSEFF.

Car, en somme, c’est la première fois que vous faites l’applicalion de vos études ? Mais oui.

Eh ! bien, ce n’est pas mal du tout, savez-vous. Il ôte son paletot, saisit une palette et me peint une main, celle d’en bas, de ce ton blanchâtre qui lui est propre.

(Il a touché aux cheveux et je les ai entièrement refaits ; de même pour la main.) Donc, il me travaille la main, etje m’amuse, et nous causons. C’est égal, sauf le fond, les cheveux et les peluches, c’est de la sale peinture. C’est du ratatinage. Je puis faire mieux. d’est l’avis de Tony ; mais néanmoins il est content et dit que s’il y avait chance d’être refusée au Salon, il serait le premier à me dire de ne pas envoyer. Il dit qu’il s’étonne de voir ce que j’ai fait : c’est bien conçu, bien arragé, bien établi, c’est harmonieux, élégant, gracieux.

Ohi oui, oui, mais je suis mécontente des chairs ! Et penser que l’on dira que c’est ma manière !  ! G’est du ratatinage ! Je suis obligée d’avoir recours aux glacis !  ! Moi qui adore la peinture franche, simple, du premier coup. Je vous assure qu’il m’en coûte d’exposer quelque chose qui me déplait tant comme exécution ; quelque chose qui est, si différent de ce que j’ai l’habitude de faire… Il est vrai que je n’ai jamais fait quelque chose qui m’ait plu… ; mais enfin, c’est sale, c’est rafistolé Tony dit que Breslau a subi cette fois l’influence de Bastien-Lepage. Elle subit mon influence comme je subis la sienne. Tony est aussi bon que possible. Et dire que j’aurais pu faire mieux ! Maudite modestie ! Sacré manque de confiance ! Si je n’avais pas été à trembler et à me demander : To be or not to be !… Ne commettons pas l’ineptie de déplorer un fait accompli