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JOURNAL

jamais vu et qu’en somme il valait mieux avouer son ignorance.

Du reste, Tony a été très content de ma tête. Breslau m’a fait demander la permission de faire mon modèle, j’ai généreusement consenti et nous offrons à l’atelier aux aguets le louchant spectacle de nos deux amitiés côte à côle. Elles sont vraiment enfants ; moi, je me moque de tout cela. Tony a dil que c’est très bien commencé, qu’il n’y a qu’à aller. Nous avons l’air de faire un concours avec Breslau et je l’ai battue, jusqu’à présent du moins. (Nous reprendrons la semaine d’après, quand ce sera sec.) Cela amuse toute la boutique et tout le monde veut poser pour moi. Je fais enrager cette bonne Breslau en disant que mon tableau trouve acheteur à 1, 500 francs, et que je suis accrochée dans la galerie du pourlour… C’est triste, dis-je, mais juste, ma peinture n’est pas fameuse, je l’avoue d’autant plus volontiers que c’est très naturel : deux ans de travail, ma première exposition, et quinze jours pour exécuter… Du reste, l’administration a été relativement juste. On n’a accroché dans la fameuse galerie que les plus mauvaises choses, il n’y a pas une toile propre, etc… Lundi 10 mai.

— Ce qui est bon, c’est quand je veux contrarier mes penchants. Je n’y suis encore jamais parvenue ; je n’ai même jamais essayé de lutter ; tout se borne à une résolution prise d’avance et ligne de conduite jamais suivie. Tout se fait sous l’inspiration du moment, comme cela me plaît el comme cela vient. O diplomatie !… ou plutôt c’est que tout bonnement il m’est désagréable de ne pas suivre ma nature et que je la suis. une