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DE MARIE BASHKIRTSEFF.

le premier pas qui coûte. Ce proverbe ne m’a jamais tant frappée.

Et puis, il y a aussi et surtout la question de milieu. Le mien peut se qualifier, malgré la meilleure volonté du monde, d’abrutissant. Les gens de ma famille sont, pour la plupart, ignorants et ordinaires. Puis, il y a Mme G…, qui est une mondaine par excellence. Et puis, le monde qui vient en visite ; on cause rarement, et vous connaissez les habitués : la M…, etc., quelques jeunes gens incolores. Aussi, je vous assure que si je ne me renfermais si souvent avec moi et mes lectures, je serais encore moins vive d’intelligence que je ne le suis. J’ai l’air de briser les vitres, et parfois personne n’a plus de difficulté à se produire. Souvent je deviens imbécile, les mots se pressent dans la bouche et je ne puis parler. J’écoute, je souris vaguement, et c’est tout.

Mercredi 18 août. promenade ; cinq heures à cheval avec ce traitement affaiblissant. Et je suis éreintée, dans le sens exact du Nous avons fait une trop grande mot.

Je crains que le traitement ne donne raison à cet animal de docteur des eaux, qui a prétendu que j’étais faible… Il est vrai que, quand j’eus fini, il m’assura que, pour avoir si bien supporté vingt et un bains, il fallait être très forte. La médecine est une triste science. Nous avons monté jusqu’au sommet du Sancy ; les montagnes qui encaissent l’horrible Mont-Dore paraissent plates de cette hauteur. Le spectacle du haut du Sancy est vraiment grandiose ; j’aimerais voir un lever de soleil de là-haut. Les lointains sont d’une teinte bleuâtre qui m’a fait penser à la Méditerranée, et il n’y a que cela de beau, L’ascension à pied est très pénible ; M. B. — 1u.

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