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DE MARIE BASHKIRTSEFF.

chaque fois que je parle du Salon. Mais pour que vous compreniez l’effet que celame fait, il faut vous dire que ce portrait ne me plaît et ne m’amuse pas, que je le fais par complaisance, que le modėle n’a rien d’empoignant, que je le fais parce que, dans un moment d’expansion, j’ai promis ; -cette expansion idiote qui fait que jedonnerais tout et me creuse la cervelle pour savoir ce que je pourrais bien offrir et comment je ferais mieux plaisir à n’importe qui, à tout le monde. — Et si vous croyez que cela m’arrive rarement ! C’est presque toujours comme ça, sauf quand je suis trop ennuyée… et encore…

Ce n’est même pas une qualité, c’est dans ma nature de vouloir faire le bonheur de tout le monde et de m’emballer avec des attendrissements bêtes ! Vous ne saviez pas cela et je passe pour égoiste ; arrangez le tout ensemble. Donc, ce.portrait que j’ai hâte d’avoir fini ; on me le met sous le nez à toute minute pour cette exposition qui me préoccupe depuis un an, à laquelle je rêve et sur laquelle je fonde de si belles espérances. Alors, il semble que c’est pour que je n’expose rien ; je dis il semble, parce qu’il serait trop cruel pour moi si vous pensiez que c’est vrai.– Et puis, toujours cette scie du portrait que je ferais bien, dit-il, de faire à l’atelier, je le ferai mieux ainsi. Enfin, voilà mon exposition. Ceci dit, vous ne serez pasétonné queje sois revenue à la maison les mâchoires contraclées et craignant de faire un mouvement, de peur de fondre en larmes et de pleurer comme à présent. Aussi fallait-il être folle de croire à quelque chose de possible pour moi ! O néant !

Maintenant, c’est envenimé, et la question du Salon me ferait pousser des cris. Voilà donc où je suis après