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JOURNAL

ennemie des chairs ignobles de Rubens et des chairs magnifiques mais bétes de Titien, Il faut l’esprit et le corps. Il faut, comme Velazquez, exécuter en poète et penser en homme d’esprit. Mardi 12 octobre. — J’ai rêvé qu’on m’expliquait ce que j’avais dans le poumon droit ; dans certaines parties l’air ne pénètre pas… ce qui fait remonter… ; mais c’est trop dégoûtant à raconter, il suffit que je sois atteinte. Ah ! je le sais, car depuis quelque temps je sens une espèce de malaise, de légère faiblesse indéfinissable ; mais je ne suis plus comme avant, je ne me sens pas comme les autres ; une sorte de vapeur affaiblissante m’enveloppe, je parle au figuré bien entendu. Il semble que j’ai quelque chose d’étrange dans la poitrine et j’ai… ; mais à quọi bon ces absurdités ? On verra bien,

Mercredi 13 octobre. Ce Paris, je l’ai toujours détesté, au physique, toujours, toujours. Combien Madrid est plus sympathique, malgré ses rues irrégulières et son apparence pauvre, en comparaison de Paris. Voyez Paris : son élégance fatigue, ses magasins, ses cocottes,

ses maisons neuves, c’est terriblement anti-artistique.

Oh ! Rome (et Madrid lui ressemble un peu). Ohlle Midi. Je suis du Midi, moi, née en Ukraine et grandie à Nice ; j’adore le Midi.

Je finis ma copie du Vulcain, de Velazquez, et, à en croire le public, elle doit étre bonne. Les pauvres diables d’artistes qui font des réductions des tableaux célèbres, pour la vente, viennent plusieurs fois par jour me voir travailler, et les gamins de l’École des Beaux-Arts, et les étrangers, dont plusieurs, en anglais,